Grand Raid du Mercantour : LE RECIT Partie 2
Suite du Récit ... avec les émotions et le vécu ''à chaud'' je le répète ...
Nous sommes donc à l'attaque de la Cime de la Valette, toujours tous les 2, a priori inséparables si il n' y a pas de défaillance ; on s'entend à merveille, on se relaie, (vous avez perçu le jeu de mot ??) et notre forme du jour semble très proche !
J'attaque donc l'ascension, à la marche (je précise au cas où certains aient peur qu'on passe en couant ! ca pas non !!), en utilisant mes bâtons au maximum. Je branche mon Suuto en position altimètre, de sorte à voir notre progression, et très vite, il m'indique 950 - 980 - 1030 m/heure en vitesse ascentionnelle ! Pas mal quand même, au moins çà durera moins longtemps que prévu ... sauf que rapidement, le Seb me fait part d'un petit coup de moins bien ; je l'incite à passer devant, mais il préfère que je fasse le tempo ; il temporisera même 2-3 fois pour s'alimenter, boire, craignant un début d'hypo; j'en profite pour en faire de même, et m'arroser, car nous sommes en plein soleil et il est pas loin de midi : ça chauffe dur !! Je maintiens le rythme, en l'encourageant parfois, mais en faisant surtout attention au balisage, car à mi-pente, le chemin n'est plus évident, nous arrivons dans les alpages. Et à ce moment, pour m'assurer que Seb s'est bien refait la cerise, j'aperçoit en contre bas un coureur ! A 2-3 minutes, pas plus ! Il ne s'agit pas de Guillaume, mais en fait de D.Tondini, très bon coureur Corse (déjà 11ème au Grand Raid de la Réunion il me semble), que l'on avait déjà aperçu à la Baisse de Prals ! Il va pas falloir mollir, çà nous met un bon petit coup au derrière, on s'endormait presque dans notre ''train-train'' (j'ai dit presque, parce qu'on pas fait du tourisme quand même !), et bien là, va falloir cravacher dur, la route est longue ! Seb s'est refait, çà tombe à pic. On finit l'ascension ''costaud'', avec toujours cette pression derrière désormais. Au sommet, on se retourne, on a refait le trou, on ne voit plus personne (il aura coincé à ce moment là !). Mais rien est fait !! ... si, cette seconde et dure section; plus que 20km !!
PARTIE 3
Cime de la Valette (km60 - 2500m) - St Martin de Vésubie (km82 - 980m)
22 Km
D+700
D-2300
Ce que je me suis dit pour une gestion optimale :
'Portion où il faut courir, courir, et courir le plus possible ! Cà descends … enfin presque …''
Les chiffres parlent d'eux-mêmes : il ne reste que 700m de d+ sur ces 20 derniers km, il faut donc
avoir la possibilité de courir pour boucler le plus vite possible ce parcours dantesque ! En tout
le fait d'y être préparé mentalement, après avoir marché longtemps, çà peut aider !
Les Points à retenir :
Ravitaillement Km 68 avec Sac Coureur à disposition
De nombreux sentiers à flanc et en balcons où la capacité à courir sera primordiale : des relances
Soigner hydratation et alimentation jusqu'à la fin de course
Attention à la remontée (d+100) pour rallier Madone de Fenestre ! En bas de la descente on est pas
arrivé …
La dernière descente sera piégeuse, car très technique, et surtout très longue (d-1350), rien ne
sera fait au sommet !
Les Difficultés du parcours :
Cime du Pisset - km 72 - d+400
Cime du Piagu - km 75 - d+200
Voilà comment je percevais avant le départ ces 20 derniers km ; mon cerveau bascule en mode ''Partie 3'' pour illustrer mon fonctionnement ! D'autant que notre ami corse nous met la pression, pour courir, on va courir ! Le temps tourne, le ciel se charge et le plafond semble descendre; la visibilité reste excellente pour le balisage, mais il semble en être terminé pour les coups de soleil, et nous profiterons désormais beaucoup moins des panoramas du Mercantour, dommage ...
Pour la première partie, il nous faut rejoindre la Baisse de Ferisson, 3-4 km de sentiers en balcons, avec quelques ''coups-de-cul'' ; le rythme, que je continue à impulser, sera plus que bon ! On a tout couru, sans jamais relâcher ! Juste un coup d'arrêt devant un névé en devers avec une forte pente; je m'arrête, je le sens pas. Seb semble ok pour passer, mais je vois alors le balisage qui contourne ce dernier par en haut. Dur, dur de remonter en plein élan, mais y a pas le choix, on fait le tour ! On relance de nouveau, et arrivons très vite à la Baisse de Férisson.
Il y a désormais 400m de descente pour rejoindre Madone de Fenestre, km68; enfin 400m de descente et 100m de remontée ! j'avais bien identifié ce petit morceau sur la carte, et c'est vrai que çà peut surprendre si on s'y attend pas. Seb repasse devant pour la descente, il descend vraiment très bien. On connaît aussi les qualités des Corses sur ces terrains, il ne faut pas traîner !! On traverse le pont, du moins ce qu'il en reste après une énorme coulée de neige qui a emporté toute la forêt avec elle, et il nous revenir a Madone. On marche sur la partie montante, et nous voilà au ravitaillement, où on retrouve nos sacs et pour Seb les encouragements de toute sa petite famille.
Le Ravito est complet. Je refais le plein de mes bouteilles pour le dernier tronçon, encore 2 heures d'efforts à peu près si je m'en tiens aux temps réalisés par les 1er en 2007. Je prends quelques pates. L'ambiance au sein du refuge est très bonne enfant; c'est marrant, il y a pleins de coureurs, sauf que beaucoup en sont au km40 ! Seb est connu comme le loup blanc ici, mais beaucoup semblent s'intriguer sur ma personne et se renseignent sur la tête de course. Sympa ! Après 5' d'arrêt à peu près, nous repartons, sans savoir où se trouve notre poursuivant, donc nous avons toujours cette pression ! (en fait, les pointages nous montreront que nous avions alors plus de 17' d'avance, la preuve d'une section très rapide entre la Cime et la Madone).
Seb me donne les indications sur ce final, celà correspond à l'idée que je m'en étais faite, et en plus je connais la descente, pour l'avoir faite jeudi avec mon Poulet; c'est reparti !! Je suis en excellent état physiquement, je tenais une grande forme ce jour là !! Même pas peur !
Je donne le tempo dans l'ascension, et l'altimètre ne faiblit pas, nous montons toujours sur une moyenne de 900m/h. Dès que nous abordons les entiers en balcon, on s emet à trotinner, gentiment, mais de manière très régulière; rapidement, nous arrivons sur l'autre evrsant et nous apercevons à la fois la Cime du Pisset, juste devant nous, et au loin, la Cime du Piagu avec les dernières belles pentes qui nous attendent ! Toute cette portion sera courue au maximum, je suis vraiment bien, sans pour autant pouvoir accélérer davantage, mais avec une alimentation parfaite du début à la fin, aucn problème d'hydratation, j'ai vraiment réussi à bien gérer tous ces paramètres du début à la fin, et ce qui me fait expliquer le maintien du rythme en cette fin de course. Les 2 derniers ''coups de cul'' pour passer au Piagu se font à l'arachée, surtout la dernière dans la caillasse, Seb en a bien assez il me semble, mais nous voilà prêts à basculer sur St Martin !! Seb prend le temps de se ravitailler au sommet, derrière, visiblement plus personne ... cette fois, celà semble joué ... je réalise pas du tout à ce moment là,( et aujourd'hui finalement non plus ), il me semble juste avoir fait une bonne course ...Il ne fait plus très chaud du tout, il commence même à pluviner légèrement ... je prends alors les commandements pour l'amorce de la descente et la belle crête bien technique !!
Finalement, je me lâche un peu, et nous allons finir la descente même bien ! On traverse la forêt et ses pentes raides et techniques ...
Le Seb retrouve des ailes à quelques kilomètres de la ligne, et je suis même obligé de le freiner !! Sur les portions courables, sur piste et/ou chemin sur tapis d'épines de sapins, il envoie à plus de 15km/h (si c'est pas plus !) ... alors que moi, alors que le plaisir d'en terminer devrait me gagner, et bien j'accuse le coup mentalement !! Comme sur unUTMB2007, un GRAND RAID 2008, alors que la course a été super, le résultat inespéré, ... et bien ma tête me lâche à quelques encablures de l'arrivée !! Bizarre non ?? une lassitude profonde s'installe, j'ai envie de terminer ''tranquillou'' ... je m'accroche quand même, pour ne pas trop le ralentir ... le village approche, nous allons franchir la ligne d'arrivée tous les 2, après plus de 11heures de course commune, un périple extraordinaire, avec des passages qui resteront longtemps dans ma mémoire de coureur ... nous entrons dans St Martin ...
La rue pietonne, le dernier virage à droite, nous sommes sur la place, ce même lieu où le départ a été donné un peu plus tôt dans la journée !! La boucle est bouclée !! Quel bonheur !
On restera quelque peu sur la ligne d'arrivée, pour quelques photos et quelques mots au micro, puis on récupère la fameuse polaire ''finisher'' estampillée MERCANTOUR, avant de pouvoir se ravitailler ! Ce qui me fait bizarre à cet instant, c'est finalement de me retrouver un peu seul ... personne avec qui partager cette arrivée ... ma femme et ma fille n'ont pu venir, la famille n'a pas fait le déplacement, les potes sont encore sur le parcours (le contraire aurait été une mauvaise nouvelle !) ... cette situation ne m'est pas familière, moi qui ait l'habitude de partager ces courses avec mes proches habituellement ! J'en profite pour me restaurer, avec l'accueil iréprochable des bénévoles alors en place, et attendre Dominique Tondini, qui arrivera quelques 20' plus tard, après avoir ''rien lâché'' dans la dernière descente ! çà devait être quelque chose ...
Ensuite, je m'empresse de retourner au camping, pour une bonne douche et ensuite revenir sur l'aire d'arrivée, pour y attendre tous les copains ! Au camping, petite photo devant le cabanon d'accueil pour le souvenir, la fameuse douche tant attendue, et me voilà reparti au village; finalemen, les arrivées sont très espacées, j'en profite donc pour me faire masser (je remercie la bénévole en place, très sympathique et très professionnelle !), boire un coup offert par Guillaume et Pascal, qui m'expliqueront leur abandon finalement, mais avec toujours ce même humour permanent, et finalement, le premier à rentrer sera Le Caillou ! 65ème, pas mal pour un V2 ! Le temps qu'il raconte toutes ses péripéties (il a réussi à se perdre à 3 kilomètres de l'arrivée par exemple), et notamment la grêle qui est tombé derrière nous (incompréhensible pour moi ! On a eu beau temps presque tout le temps!!) ... et voilà le Sylvain, puis le Poulet, bien explosé quand même !! Suf que notre Pilou manque à l'appel ... Sylvain nous dit qu'il devait abandonner au Relais des Merveilles, suite à une terrible défaillance ... sauf que personne n'a de traces du Pilou ... il est 21h30 ... pas de nouvelles, il pleut désormais, il va faire nuit, de nombreux coureurs en terminent, mais impossible de savoir ce qui est arrivé à notre ami; les pires scénarios défilent même ... on va manger tout de même les excellentes pâtes offertes à l'arrivée ... le temps passe, et lorsque nous repassons à la place, pour demander une dernière fois de ses nouvelles, vers 23h30 (là çà commenc à tomber les paupières !), nous le truvons, en tenue de coureur, tout fraîchement arrivé !! Défoncé, mais heureux !! (pour savoir ce qu'il s'est passé, lisez son parcours ICI, fabuleux, et écrit avec un talent ...)
Là, vous savez tout sur ma journée ! Je regrette encore de n'avoir pu faire de photos et vidéos en fin de course ... il faudra une prochaîne fois !
DIMANCHE 21 JUIN
6h00, nous sommes déjà réveillés ... toujours difficile de dormir après ces épreuves ! Nous profiterons alors de la matinée, pour faire les affaires, savourer le pot offert par la gérante de la Ferme St Joseph (un peu de pub bien méritée !) à tous les coureurs accueillis au camping, faire quelques amplettes dans le village, et nous rendre à la place pour la remise des prix.
Les Bourricots à la Gare de Nice ...
Malgré tout, quelque chose n'est pas très normal ... on apprend que 3 coureurs ne sont pas encore rentrés ... plutôt inquiétant, le beau temps est revenu ... Lorsque nous mangerons avec Caillou, le Poulet et Dominique sur la terrasse sur la place, le cortège d'hélicoptères, défilés de gendarmes de montagne n'indiquent rien de bon. Je vois Alain, mon ami corse, Thierry, l'organisateur, je lis l'inquiétude sur leur visage. Nous quittons St Martin pour repartir vers la gare de Nice, et lorsque je prends des nouvelles par SMS, la nouvelle tombe : ''3 morts''. Toutes ces émotions de course passent immédiatement au second plan. Désormais, la tristesse et le désarroi prédominent.
Sans revenir sur ce fait tragique, je tiens pour terminer à adresser toutes mes condoléances aux proches de ces passionnés qui nous ont quitté et à adresser tout mon soutien à toutes les personnes concernées et affectées par ce drame. Si ce compte rendu s'avère dérangeant ou offusquant pour quiconque, faites me le savoir, je le retirerai par respect pour ces personnes ...
Le Lémurien
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